Masque à plis

On a beaucoup entendu que les masques en tissus réutilisables, ne servent à rien ou pas grand-chose. Or ces masques protègent autrui de nos postillons… Et si tout le monde en portait, tout le monde serait protégé ! Pas à 100% bien sûr. Les autres gestes de protection restent de mise. Mais il est temps d’ouvrir les yeux : dans les pays asiatiques ayant enrayé la pandémie, tout le monde porte un masque.

Update 30 mars: Cette évidence émerge enfin dans les médias. Ici, le do it yourself du docteur Jean-Luc Gala, infectiologue UCLouvain. Plus bas: autres tutoriels, même sans machine à coudre!

La première raison pour laquelle les épidémiologistes les déconseillent aux particuliers, c’est la pénurie de masques « pro » ! La seconde raison, c’est le fait que les masques en tissu demandent des précautions d’usage et doivent être stérilisés. Aussi, la qualité importe : trop épais, ils étouffent. Trop fin, ils ne protègent pas.

Gabarit CHU Grenoble

En ligne, les tutoriels se bousculent, dans toutes les langues, tous les styles. C’est toute une éducation à déployer. Une éducation des experts aussi ! Car s’ils commencent à admettre l’intérêt de cette dynamique de couturières amateures (pas que des femmes, mais le féminin pluriel s’impose, vu qu’il s’agit très majoritairement de femmes), ils continuent de la considérer comme un pis-aller.

Or, le fait que les masques en tissu soient réutilisables, et souvent cousus avec du tissu de récupération, est très intéressant. C’est l’économie circulaire émergeant de la nécessité et portée par des bénévoles, voire par des personnes qui les vendent à très petit prix, avec le soutien d’un groupe facebook très dynamique, créé le 13 mars dernier : Solidarité Solidariteit Coronavirus Brussels Bruxelles.

logo du groupe

Très vite, ce groupe facebook s’est organisé en sous-groupes dont le plus actif est dédié aux masques “do it yourself”. Mode d’emploi du groupe : des mots clé permettent de classer les publications par rubriques : recherche, propositions, bons plans, modèles… De nombreuses couturières amateures y ont trouvé des tutoriels et des gabarits. Les demandes affluent de tous côtés: maisons de repos, infirmières à domicile, policiers, institutions qui s’occupent des SDF et des migrants… Pour le dispatching des offres et demandes, l’outil facebook n’est pas des plus pratiques. Cependant, un groupe dynamique d’administratrices s’est constitué pour orienter au mieux les demandes comme les offres. Les limites de tels masques et les précautions qu’il faut adopter pour leur emploi, sont constamment rappelées.

Masque-bonnet

Le 17 mars, le SPF Santé Publique, interpellé de toutes parts, a publié « Masques buccaux : des citoyens responsables » , accompagné d’un tutoriel. “Le SPF Santé rappelle que “les masques faits maison sont très utiles pour les personnes qui sont malades et isolées à la maison. S’ils portent leur masque fait maison, ils diminuent le risque de contaminer quelqu’un de leur entourage.“. Attention cependant, porter un masque n’exclut pas de suivre les règles générales : continuez à garder suffisamment vos distances, à vous laver les mains fréquemment et à éviter tout contact avec une autre personne si vous êtes malade”.

Petit à petit, dans tout le pays, des communes ont pris le relais pour optimaliser le dispatching, ainsi que d’autres institutions telles que l’ULB.

Le 19 mars, la Région de Bruxelles Capitale, sous la houlette des ministres Maron et Trachte, lançait l’opération 100.000 masques à Bxl, en partenariat avec l’entreprise de travail adapté Travie, EcoRes, le Mad, Urbike et 1500 couturier.e.s bénévoles bruxelloise.s. Ces personnes reçoivent à domicile une caisse contenant les tissus coupés par l’entreprise de travail adapté et un modèle. Une fois les masques cousus, Urbike vient les rechercher. Ces masques serviront en priorité dans les maisons de repos, le secteur du sans-abrisme et les services d’aide et de soins à domicile pour protéger les personnes asymptomatiques et réduire la transmission.

Par ailleurs, l’asbl Coursdecouture.org a lancé un appel aux pouvoirs publics pour mener une opération similaire, qui permettrait à des personnes au chômage de se joindre au mouvement. Pour cela, il faut une dérogation de l’ONEM, qui n’arrive pas. Ce blocage qui empêche les chômeurs de mener en toute légalité des activités bénévoles, a été maintes fois dénoncé par nos organisations actives auprès des plus pauvres, notamment Luttes Solidarités Travail.

Update 30 mars: le magazine Axelles va plus loin: pourquoi ne pas rémunérer ce travail? Des couturières professionnelles n’attendent que ça! Il est temps de reconnaître que cette fonction essentielle mérite salaire!

En attendant le bilan de ces opérations et de l’ensemble des initiatives, quelques articles de presse retracent l’émergence du phénomène et son évolution :

Tutoriels, gabarits, conseils techniques

Les conseils « matière » d’une ingénieure textile et ses gabarits : merci Bérangère!

Quelques extraits: « Un masque en tissu cousu dans des chutes de tissus vestimentaires a une certaine efficacité envers la transmission de gouttelettes et la transmission par contact. Or le virus du COVID-19 se trouve dans les gouttelettes ! Vous n’avez pas cousu un dispositif médical, vous n’avez pas non plus cousu un masque anti-transmission au sens de la directive européenne car ce que vous cousez ne passe aucun test. Cependant vous avez cousu un masque qui va limiter la transmission de vos postillons et améliorer vos gestes barrières en diminuant la transmission par contact main-bouche! Un masque en tissu c’est donc mieux que rien ! »

Cette étude montre que bien qu’un masque en tissu fait soi-même n’est pas aussi efficace qu’un vrai dispositif médical marqué CE, il retient néanmoins une quantité de particules non négligeable. Cette autre étude montre plusieurs matériaux utilisés pour concevoir des masques DIY, et compare leur efficacité, en une couche et en deux.

Patron : à pli ou en bonnet, les deux se valent. Il faut surtout aménager une pochette pour pouvoir y mettre un filtre fin : mouchoir en papier, un Kleenex, du papier-toilettes, filtre à café ou lingettes dépoussiérantes antistatiques 100% polyester”.