Ce lundi 29 février 2016, nous avons célébré à Bruxelles le lancement du Grand bond en avant proposé à la communauté internationale par Naomi Klein. Celle-ci rebondit sur le fait que 2016 est une année bissextile pour prolonger le Leap Day (ainsi nomme-t-on le 29 février en anglais, « leap » signifiant « bond ») en Leap Year, dédiée à la transition énergétique.


Après la projection du film Sur les routes d’une Belgique sans carbone produit par le CFDD (Conseil Fédéral du Développement Durable), Marc Depoortere directeur du DFDD, a expliqué le souhait que le CFDD contribue à la mobilisation sociétale pour la transition vers une société bas-carbone. Le financement de la transition est d’ailleurs à l’agenda des travaux du CFDD. Philippe Cornélis, de la CSC, témoigne que les syndicats sont très demandeurs d’une telle concertation sociale pour pousser les investissements vers le financement de la transition, et leur revendication que cette transition soit juste. Car la dérégulation sévit dans des secteurs porteurs comme celui de l’énergie solaire… L’on y est bien moins syndiqué que dans le nucléaire, par exemple.

Mais pour réorienter les investissements, il faut encore plus de pression citoyenne sur les banques. Comme nous le remarque Laurence Roland du Réseau Financité, les citoyens sont invités chaque jour à participer à des opérations de crowdfunding ou à investir directement dans des coopératives ou autres initiatives à finalité sociétale. Cependant, ces investissements ne sont pas sans risque. D’où l’importance d’interpeller les banques sur ce qu’elles financent, avec notre épargne ou d’autres produits financiers. En 2015, à travers sa campagne « Ma banque, 0  carbone ? % », le Réseau Financité a largement dénoncé le fait que les banques, en finançant le secteur des énergies   fossiles, sont fortement impliquées dans le réchauffement climatique. Pétitions et cartes ont été transmises aux banques et 4 d’entre elles ont été interrogées sur l’adéquation entre leurs engagements et leurs actes concrets en matière d’investissement énergétique. Résultat : deux des 4 ont répondu. D’une manière générale, les banques continuent d’investir en masse dans le secteur des énergies fossiles. Et leurs stratégies climatiques sont bien modestes, en regard de leur poids financier. Par ailleurs, le Réseau Financité a dénoncé le fait que le prêt citoyen (qui passe par des banques), ne bénéficie plus d’avantages fiscaux. Et de ce fait, les banques ne le proposent plus…

Jérôme Matagne d’Inter-Environnement Bruxelles, nous a fait part d’une bonne nouvelle : dans le domaine des transports, il y en a de l’argent ! Celui qui pourrait être récupéré si l’on mettait un terme aux avantages fiscaux pour les voitures de société (entre 3 et 4 milliards €), celui qui est consacré à l’entretien des infrastructures routères… Tous ces moyens publics pourraient être mieux investis dans le financement des transports publics et dans un aménagement du territoire mieux adapté aux non-motorisés.

Laure Kervyn, qui a lancé en Belgique un groupe 350.org, a présenté la campagne internationale d’appel au désinvestissement des énergies fossiles et l’action de désobéissance civile non violente prévue en Allemagne du 13 au 16 mai 2016, Ende Gelände, à laquelle de nombreux Belges ont l’intention de participer, histoire de se former à ce type d’action encore rare en Belgique. Des bus seront affrétés, les associations sont invitées à soutenir l’initiative (signature de l’appel, distribution de tracts et affiches, financement…)

Cette proposition a suscité une discussion intéressante avec les représentants syndicaux sur le nécessaire dialogue avec les travailleurs de telles entreprises ciblées par la campagne leave it in the ground (laissez-le dans le sol, à propos des carburants fossiles). Un tel dialogue est prévu par Ende Gelände, les activistes Allemands n’ont sont pas à leur coup d’essai. Mais c’est vrai qu’en Belgique, le chantier jobs4climate initié par la Coalition Climat mériterait d’être repris.

On retiendra aussi cette réflexion de Benoît Derenne, de la Fondation pour les Générations Futures : « mes deux filles me connaissent bien, depuis le temps qu’on vit ensemble. Elles se sont extasiées sur le film Demain. N’est-ce pas ce que nous faisons depuis 20 ans ? » Ce constat largement partagé nous laisse songeurs mais nous réjouit aussi. Profitons du mouvement que suscite ce film pour suggérer des initiatives ambitieuses, dépassant le cadre de micro-projets locaux. Qu’il soit un levier pour ce grand « bond en avant » proposé par Naomi Klein !

-* Infos sur le leap day/leap year dans le monde