Dans le cadre de la Journée mondiale du refus de la misère, Luttes Solidarités Travail (LST) organisait le jeudi 16 octobre 2014 l’inauguration d’une peinture monumentale collective “Il Quarto Stato en 2014”, en présence de Madame Eliane Tillieux, Ministre de l’Emploi et de la Formation et de Monsieur Paul Magnette, Ministre-Président de la Wallonie.

Petite histoire d’une oeuvre

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“Il Quarto Stato”, signifiant “le Quart-Etat”, est une peinture célèbre de Giuseppe Pellizza da Volpedo, représentant une grève de travailleurs. Au-delà de ce mouvement de grève, c’est tout un peuple en marche que le peintre a voulu représenter.

Le titre de cette peinture n’est pas issu de nulle part. Giuseppe Pellizza da Volpedo a été inspiré par l’Histoire de la Révolution française, écrite par Jean Jaurès. Celui-ci y dénonce l’aspect profondément exclusif du Tiers Etat, les députés de la bourgeoisie aux Etats généraux. Composés de la noblesse, du clergé et de la bourgeoisie, ces Etats Généraux ne regroupaient donc qu’une partie de la population.

En 1789, Louis Pierre Dufourny de Villiers publie les “Cahiers du Quatrième Ordre” afin d’accorder à ce Quatrième Ordre, représentant les plus pauvres, les droits qu’ils méritent. Ce terme inspirera des années plus tard Giuseppe Pellizza da Volpedo pour le titre de sa peinture.

Il ne fut pas le seul à être inspiré par cette oeuvre. C’est presque deux siècles plus tard que Joseph Wresinski, qui cherchait à donner un nom collectif aux personnes en situation de grande pauvreté, s’est inspiré des “Cahiers du Quatrième Ordre” pour inventer le terme “Quart Monde”, un nom donnant une identité positive à ces personnes et témoignant de leur combat.

“Il Quarto Stato en 2014”, une réappropriation par LST

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Pendant plus de 6 mois, des enfants, des adolescents et des adultes provenant de Namur, Andenne, Jemelle et Charleroi ont travaillé dans les lieux de rassemblement d’éducation permanente et dans des ateliers de LST pour proposer leur version d’Il Quarto Stato. Chaque personnage du tableau a été fait par un groupe et représente une histoire, une envie particulière mais l’ensemble des personnages sont “Debouts, en marche”.

Cette année, avec cette inauguration, LST voulait se faire entendre, mais aussi se faire voir, montrer ce qui mobilise.

Refusons la criminalisation de la pauvreté

Monsieur Magnette l’a rappelé dans son discours: près de 20% de la population vit en situation de pauvreté en Wallonie. Les pouvoirs publics ont un rôle à jouer dans cette lutte contre la pauvreté. Jean Jaurès l’avait déjà perçu en disant que la seule chose qui sortira les hommes et les femmes de la misère, c’est la démocratie. Monsieur Magnette annonce que 70 actions concrètes d’action de lutte contre la pauvreté ont été prévues dans la Déclaration de Politique Gouvernementale de la Région Wallonne, mais le travail à faire reste immense, surtout dans le contexte actuel.

On le sait, en janvier 2015, des dizaines de milliers de personnes, déjà fragilisées, seront exclues du chômage. Les CPAS ont déjà annoncé qu’ils ne pourraient absorber autant de nouveaux bénéficiaires sans fonds supplémentaires.

En parallèle, les personnes précarisées sont de plus en plus réprimées, notamment au niveau de leurs moyens de survie (la mendicité est rendue impossible dans de plus en plus de communes).

La lutte de LST en cette Journée mondiale du refus de la misère est donc plus que nécessaire dans un contexte de diminution de la solidarité.

Comment mieux illustrer ces questions qu’en citant quelques extraits des prises de parole issues des rassemblements dans le cadre de la Journée mondiale du refus de la misère?

” Quand j’entends les politiques dire la priorité numéro 1, c’est l’emploi, j’ai envie de leur dire que notre priorité, c’est avoir un toit, manger, vivre avec nos enfants”

” De nombreuses communes adoptent des règlements tellement contraignants qu’ils rendent la mendicité impossible. C’est une répression terrible que d’interdire aux plus pauvres de recourir au dernier moyen de survie qu’il leur reste”

“J’ai peur de me retrouver dans la rue. Je sais ce que c’est…Je ne veux pas que ça recommence”

“Aujourd’hui, être pauvre, c’est devenu un délit!”.

Pour aller plus loin

Le 17 octobre, LST vous invite à un temps d’écoute et d’échange au Parlement wallon, en compagnie de Monsieur André Antoine, Président du Parlement Wallon, des parlementaires et autres acteurs de la société civile, de 9h à 15h.

Ce moment de rencontre se fera autour de la Dalle “en l’honneur des victimes de la misère” dans la galerie du Parlement.

A l’occasion des 20 ans du Rapport général de la pauvreté, LST a également sorti une publication “1994-2004: 20 ans de dialogue. Regard des plus pauvres sur la répression et la “criminalisation” de la pauvreté”.