Le HLPF avait lieu du 30 juin au 9 juillet 2014. Derrière cet acronyme se cache le High Level Political Forum, un sommet de l’ONU sur le développement durable, qui a lieu chaque année à New-York. Dans ce cadre, Rim Bakay a eu l’occasion de recevoir un mandat du Conseil de la Jeunesse en tant que jeune déléguée ONU francophone pour le développement durable pour s’y rendre et y représenter la voix des jeunes. Elle nous en parle.


Peux-tu un peu te présenter et nous expliquer pourquoi tu as choisi de représenter le Conseil de la Jeunesse au HLFP ?

photo_rim_small.jpgJe m’appelle Rim Bakay. J’ai 28 ans, et je viens de Liège. Je suis quelqu’un qui a toujours été intéressée par l’international. J’ai eu l’occasion de partir en Australie après ma rhéto. J’ai ensuite étudié les langues et littératures modernes et je suis partie à Malte en Erasmus. J’ai pu refaire un master en relations internationales à Bruxelles par la suite, et là je suis aussi partie à Leuven pendant quelques mois. Tous mes cours de diplomatie et de relations internationales m’ont vraiment passionnée! Durant mes études, j’ai aussi participé à des simulations de l’ONU, ce qui fait que je connaissais un peu leur fonctionnement avant de partir. J’ai après travaillé pour une ONG liée au Parlement Européen. J’ai également été professeur d’anglais pendant 5 ans, ce qui m’a amenée à m’intéresser à la question de l’éducation. Par la suite, en cherchant du travail, je me suis rendue compte de la difficulté de trouver un emploi, mais comme j’avais envie de continuer à être active, je suis devenue bénévole pour le Conseil de la Jeunesse, en m’impliquant dans la Commission internationale. Du coup, j’ai rencontré beaucoup de personnes intéressées par les mêmes sujets que moi, et puis quelques semaines après, ce mandat est arrivé. J’ai donc postulé, comme tout le monde…et j’ai eu le poste!

Qu’as-tu fait au fond pendant ces 10 jours ? Quel était ton quotidien ?

Déjà, il faut savoir qu’il y a vraiment eu un travail important au préalable, avant le HLPF. Il y a eu un groupe de travail pour élaborer une note de position,qui a été votée en AG, par rapport à onze thématiques principales. On a mis en place aussi un sondage en ligne, pour que les jeunes puissent s’exprimer sur les thématiques qu’on proposait. Ces réponses coïncidaient avec les priorités qu’on avait établies. C’était déjà un travail fou! Je voulais également avoir de la crédibilité une fois sur place, je ne voulais pas qu’on passe pour des jeunes qui ne connaissaient par leur sujet. Il y a donc eu un vrai travail de préparation à ce niveau-là, pour qu’on soit pris au sérieux et qu’on écoute nos revendications. A New York, les journées étaient bien remplies avec des séances de trois heures de l’ECOSOC (Conseil économique et social, qui dirigeait le HLPF). Chaque pays avait l’occasion de donner sa position par rapport aux sujets discutés. A côté de ces séances, il y avait également un grand rôle à jouer lors des “side events”, sur différents sujets. Personnellement, j’allais principalement aux side events portant sur la jeunesse ou sur des sujets avec lesquels je me sentais particulièrement à l’aise. Cela se passe en plus petit comité et c’est moins formels, il est donc plus facile de s’y exprimer, d’échanger des contacts. C’était donc de grosses journées, entre les debriefings, les sessions, les side events, les diners,…mais je voulais en profiter! Et maintenant, à mon retour, il reste encore aussi beaucoup de travail évidemment.

Les 11 objectifs du Conseil de la Jeunesse sont ambitieux. Vous parlez d’un accès universel à une santé de qualité, de l’éradiquation de la pauvreté ou encore d’un accès à l’énergie durable. Penses-tu qu’un tel forum puisse répondre à toutes ces préoccupations ?

Déjà, il y a un aspect très formel, très diplomatique lié à ce genre d’évènements, on est parfois fort dans le discours. Mais on avait envie de venir avec un programme ambitieux. Je pense que de telles idées peuvent entrer dans les lignes directrices de l’ONU. Tout le monde est d’accord pour dire que Rio était un échec, ils essaient d’aller maintenant vers quelque chose de plus ambitieux, de plus osé. On reparle des 2 degrés, on parle de la place des jeunes, on parle de l’emploi. Ces thématiques-là étaient ancrées dans les discussions et notre position s’inscrivait pleinement dans cette dynamique. Ça peut être pris comme quelque chose d’utopique mais ça servait aussi à interpeller, à évoquer des idées, même si elles ne sont pas forcément prises en compte. On devait aussi être ambitieux en sachant que ça allait être sujet à concessions pour arriver à des positions communes entre les délégations. Et puis surtout, si on n’arrivait pas avec des idées plus ambitieuses, personne ne l’aurait fait. On a amené toutes les questions un peu taboues, pour pouvoir en discuter, tout en restant ancré dans la réalité évidemment.

Quelle place avaient les jeunes dans cette instance ? Etait-on dans de la réelle participation ?

Nos thématiques étaient entendues. Que ce soit lors de discussion avec Madame l’ambassadeur de Belgique ou lors des séances, on entendait constamment l’importance donnée à la jeunesse et à toutes les thématiques qui y sont liées, comme l’emploi. Donc ça nous encourageait, ça nous donnait un certain poids et de la crédibilité dans cette grande instance internationale. J’ai l’impression qu’on a pu avoir un réel rôle de lobbying, au sens positif du terme.
C’était peut-être favorisé parce qu’on n’était que 10-15 jeunes pour l’ensemble des délégations, ce qui fait qu’on avait beaucoup de contacts entre nous et qu’on était associés à l’ensemble des discussions. La délégation belge de notre côté nous a réellement intégré pendant cette semaine, on n’était pas dans une position secondaire. On a participé à tous les debriefings de la mission, on mangeait régulièrement ensemble, et on garde de très bons rapports encore maintenant, de retour en Belgique.
Mais globalement, j’ai l’impression que l’ensemble des délégations se sentaient obligées de parler des jeunes, de nous prendre en compte, tellement les thématiques de l’emploi, de l’éducation, de la pauvreté nous touchent. Ils ne pouvaient plus nous ignorer, et ça, ça a donné de l’importance à nos revendications en tant que jeunes.
On a également pu avoir droit à un panel jeune, via le major group Children and Youth, ce qui fait que pour chaque discussion, chaque thématique en séance, on avait l’occasion de préparer un discours et l’un d’entre nous pouvait s’exprimer. C’était un grand travail de préparation : écrire les discours, et surtout se mettre d’accord sur un texte commun. J’ai eu dans ce cadre l’opportunité de faire un discours, devant le président de l’ECOSOC !

Avec le recul, qu’est-ce que tu retiens de cette expérience ?

Probablement le discours que j’ai eu l’occasion de faire. Je le retiendrai vraiment, c’était un bon moment. Aussi parce que le sujet me touchait vraiment, c’était sur l’importance de l’implication des jeunes dans le futur HLPF, en tant que réels participants. Ce qui m’a frappé aussi, c’est à quel point on entendait tout le temps le mot “participation” ou l’accent mis sur le rôle des jeunes. On a donc dépassé un stade de parole, on a vraiment un rôle à jouer. Quand je vois la crédibilité qu’on nous a accordée, les relations qu’on a établies, je pense que vraiment on a pu dégager une image positive, mature et ouverte. Ce qui me donne confiance pour les partenariats qu’on va pouvoir établir par la suite. Quelle expérience! Pouvoir s’exprimer ainsi, échanger avec des personnes de tous les pays. C’est sûr qu’on ne va pas changer le monde en neuf jours, mais au moins j’ai eu l’occasion d’être active dans quelque chose, de porter la voix des jeunes.

Et la suite ?

Je n’hésitais pas à échanger des cartes de visite à la sortie de chaque side events donc il va falloir relancer tous ces contacts. J’espère vraiment pouvoir entretenir les liens que j’ai établis sur place. J’ai aussi l’impression qu’il va pouvoir y avoir quelques partenariats internationaux intéressants, j’ai eu plusieurs propositions concrètes pour le Conseil de la Jeunesse. Il y a aussi des plateformes spécifiques « jeune » à l’ONU, qui étaient intéressées de maintenir un contact avec nous. Et puis, le mandat dure un an, il va falloir approfondir les positions, aller plus loin, faire des rapports, continuer à en parler dans telles ou telles instances. Je vais aussi pouvoir informer le secteur associatif belge sur ce qui s’est passé au HLPF, ce qui s’est dit. C’est une thématique qui me passionne donc je compte bien continuer.

Propos recueillis par Marie Dagnely

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