Associations 21 a assisté pour vous aux deux premières présentations publiques en français de la campagne « JePrendsPart » de New B, lancée officiellement le dimanche 24 mars 2013, et présentée à Mundo-B le jeudi 28 mars 2013. Synthèse des informations rassemblées lors de ces événements.

Qu’est-ce que New B ?

New B est un projet de banque, porté par une coopérative d’envergure nationale, à laquelle peuvent adhérer des citoyens (pour 20 € maximum durant la campagne « JePrendsPart » jusqu’au 30 juin 2013) et des associations (à partir de 2000 €). La coopérative a été créée en 2011 par les 24 premières organisations adhérentes, elles sont à présent plus de 60, représentant tout un kaléidoscope pluraliste de la société civile belge francophone et néerlandophone.

Pourquoi cette campagne « JePrendsPart »?

Parce que pour pouvoir être agréé comme banque en Belgique, il faut fournir à la Banque Nationale un dossier présentant un business plan et les investisseurs. Or pour convaincre ces derniers, l’initiative doit faire la preuve de l’intérêt de ses clients potentiels. On peut dire qu’avec 24.000 coopérateurs en moins d’une semaine, 38.000 après 1 mois, l’intérêt est manifeste ! Voici donc un premier défi relevé.

Quelles sont les attentes des coopérateurs ?

Erwin Schopges, porte-parole de Fairebel
Interrogés lors des séances d’informations, ceux-ci évoquent, pêle-mêle, la séparation des métiers bancaires, pour protéger des dépôts des dérives spéculatives; le nécessaire changement de modèle économique; le fait que dans le climat ambiant, on se réjouit de contribuer à une initiative positive; qu’il ne s’agit plus de considérer l’argent comme un produit; qu’il est temps de réinvestir dans l’économie locale, de donner leur chance à des jeunes et de prendre en compte les critères d’investissement socialement responsable qui incluent le respect de l’environnement. Enfin, certains anciens évoquent les expériences coopératives qui se sont développées dès le XIXe siècle, parfois avec un succès durable. La demande est forte… C’est donc le moment où jamais!

Qui sont les initiateurs de New B ?

Mathieu Sonck, secrétaire général d'Inter-Environnement Bruxelles
Suite à la crise financière de 2008 et ses impacts à rebondissement sur l’économie mondiale, en Belgique, divers acteurs de la société civile ont résolu de ne pas attendre de changement de la part des acteurs traditionnels du secteur bancaire. Parmi eux, diverses organisations membres d’Associations 21. L’initiative est également soutenue par un réseau d’experts financiers : académiques, banquiers retraités ou ayant « fui » le secteur vu ses dysfonctionnements… C’est justement la collaboration et les échanges entre ces deux mondes, société civile et finance, qui fait toute l’originalité de l’initiative.

Le président de New B est Bernard Bayot, directeur du Réseau Financement Alternatif. Cette association réalise et diffuse le magazine Financité, via La Libre et divers points de dépôt. Depuis 25 ans, elle crée ou promeut des produits financiers éthiques et solidaires, publie des études sur l’investissement socialement responsable et l’inclusion financière, suscite des dynamiques collectives au niveau local (groupes Financité) et organise des campagnes d’opinion.

Pourquoi une nouvelle banque ?

Le projet est assez ambitieux puisqu’il s’agira d’offrir à tous les citoyens vivant en Belgique la possibilité d’ouvrir un compte à vue et un compte d’épargne dans la nouvelle banque. D’autres services seront proposés mais en aucun cas, la banque ne développera pas de produits financiers sophistiqués. En effet, il s’agit de créer une banque :

 Transparente : tous les services proposés devront être compréhensibles et simples. Les projets financés devront être visibles, dans l’économie réelle. La banque sera une coopérative de type caisse d’épargne, à la différence par exemple d’Arco, qui n’était pas une banque, mais une structure déjà difficile à comprendre.

Antoinette Brouyaux, coordinatrice d'Associations 21

 Participative : basée sur la diversité de ses coopérateurs et organisations porteuses et favorisant entre eux les échanges et les initiatives. Il sera également possible de poser des questions sur la gestion de la banque, les types d’investissements consentis lors des assemblées générales.

 Sobre : le fonctionnement sera économe, sans excès, efficace. Les dividendes seront de maximum 6%. Pas de bonus, ni de parachute doré, une tension salariale de maximum 1 à 5. Et plutôt que de travailler dans un coûteux réseau d’agences, les banquiers seront mobiles et recevront leurs clients dans les locaux des associations ou syndicats membres implantés dans diverses villes.

 Respectant les critères de durabilité : ces critères, tant positifs que négatifs, seront exigeants et précis. Les associations membres ont déjà dressé une liste noire (excluant certains types d’investissements) de 2 pages ! Celle-ci va encore être complétée par le mouvement de la Paix qui vient de rejoindre le projet. Les syndicats, quant à eux, insistent sur le respect des conditions de travail, ici et ailleurs…

 Innovante et locale : les membres pourront proposer des solutions financières adaptées à leurs besoins. Ainsi, pour les associations de fait (ex. mouvements de jeunesse), il devient de plus en plus difficile d’ouvrir un compte. Voilà qui pourrait être résolu avec la New B. Quant au financement de l’économie réelle, il pourra concerner des PME, de plus grandes entreprises, des projets à court ou à long terme… Bref, une diversité d’activités à la différence des banques traditionnelles dont les critères d’octroi de crédits sont très formatés, surtout depuis la crise financière.

Voilà pour les fondements. A présent comment rendre la bâtisse habitable ?

Dans le panorama des banques actuelles, on en trouve des grandes, des virtuelles, des casseurs de prix… Sur le terrain, il reste un vide. Si l’on veut favoriser la transition vers une autre économie, c’est ce vide qu’il faut investir.
Des modèles de banques coopératives d’autres pays ont été étudiés : ils ne peuvent être copiés tels quels mais fournissent matière à inspiration. Ainsi, la Caisse Desjardins, principale banque coopérative du Québec, s’est dit prête à aider l’initiative belge. Aux Etats-Unis, le community banking est en plein boum. On peut aussi citer l’exemple de la Kiwi Bank en Nouvelle Zélande, le Crédit Coopératif en France, la coopérative Mondragon en Espagne, les Raffeisenkassen en Allemagne, la Banca Etica en Italie… Rien qu’aux Pays-Bas, l’épargne durable représente 4,8% du marché bancaire, contre 0,5% en Belgique. Or aux Pays-Bas, deux banques, ASN et Triodos, se renforcent avec des modèles complémentaires.

Quid des rendements financiers ?

Le rendement du capital (les dividendes) sera limité à 6%. Quant au rendement de l’épargne, il se situera dans la moyenne du marché tout en offrant un plus en termes de rendement sociétal. L’objectif est d’atteindre un équilibre entre rendement sociétal et financier, que les deux aillent de pair. La notion même d’intérêt peut être questionnée, des prêts sans intérêt pourraient être pratiqués par la banque, sans que ce soit pour autant la règle générale.
L’enjeu est en tout cas de revaloriser la notion de placement à long terme, de « capital patient » : ainsi, l’isolation des bâtiments est importante dans le contexte énergétique et climatique actuel. Cependant, cette opération reste fastidieuse. Il faut donc développer des modes de financement de tels travaux dont la rentabilité n’est pas immédiate. Tant qu’on reste dans une logique spéculative et de rendements à deux chiffres, ce n’est pas envisageable.

Quelles différences avec Triodos ?

L’objectif est d’obtenir à tous les niveau de la gouvernance, une alchimie entre les préoccupations des associations et celles des financiers. Cette alchimie est à la base du projet. Triodos est une banque d’une autre nature : cette société anonyme est effectivement un pionnier important qui depuis 20 ans a mis l’épargne durable sur le marché. Mais cela reste une niche. L’ambition de New B est plus vaste, qu’il s’agisse de la clientèle, des produits & services, du rendement des comptes d’épargne, transparence, participation. Tout cela en interaction entre société civile et monde bancaire.

Quelques éléments du business plan

A moyen terme, le capital sera détenu par l’ensemble des coopérateurs. Ce n’est évidemment pas à coup de 20€ que l’on récoltera plusieurs millions d’euros. Il faudra trouver des investisseurs acceptant un dividende de max 6% et toutes les valeurs sociétales fixées par les membres. Mais la première chose dont ceux-ci veulent s’assurer est la clientèle potentielle, or le succès de la campagne « JePrendsPart » peut déjà les rassurer sur ce point. Il faudra aussi passer le cap de l’agrément par la Banque Nationale, qui a de nombreuses exigences, notamment vis-à-vis des responsables de la nouvelle banque… La suite du processus fera l’objet des décisions de l’AG du 6 juillet 2013. Affaire à suivre!

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